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Les procédures de licenciement en France (article en français)

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La rupture conventionnelle d’un contrat de travail en France (article en allemand)

Les clauses de concurrence post-contractuelles (article en allemand)

La Mise en Place du Comité Social et Economique (CSE) (article en français)


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Les procédures de sauvegarde et de liquidation (article en allemand)

Le recouvrement de créances en France (article en français)

Action directe issue de la loi GAYSSOT du 6 février 1998 (article en français)

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Les formes de sociétés en France et en Allemagne (article en anglais)

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La reprise d’une entreprise (article en allemand)


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Droit successoral français (article en allemand)

Une succession Franco-Allemande (article en français)

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Guide de l’export en Europe (article en anglais)

Faut-il choisir la société Européenne ? (article en français)

Les avantages d’une SCI pour les non-résidents (article en français)


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Les formes de sociétés en France et en Allemagne (article en anglais)


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Une succession Franco-Allemande (article en français)

Guide pratique du droit allemand des successions (article en français)


 

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Le recouvrement de créances en France

La France constitue un partenaire commercial important pour les sociétés et les particuliers, notamment de l’Union Européenne. Aussi bien son système bancaire que sa réglementation en matière de paiements sont tout à fait comparables à ce qui se pratique dans d’autres pays du monde occidental.
Bien que, de façon générale, les flux financiers transfrontaliers entre sociétés s’effectuent sans difficultés, il arrive cependant qu’un débiteur français soit n’entend pas payer dans les délais impartis et convenus avec son fournisseur, soit se trouve en véritable difficulté de paiement, ce qui, dans ce cas, peut obliger le créancier à devoir prendre des mesures d’exécution conservatoires préalables.
L’avocat français, auquel un créancier confie son dossier en vue du recouvrement de sa créance à l’encontre d’un débiteur récalcitrant, aura recours à un ensemble de mesures judiciaires coercitives, précédées de certaines précautions indispensables, qui sont les suivantes :

I – Phases précontentieuses
Une prise de renseignements auprès du Registre du Commerce de la société débitrice, afin de vérifier son état de solvabilité (par exemple, pour constater si elle ne fait pas l’objet d’une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation de biens). S’il devait s’avérer que la société est déjà en faillite, la société demanderesse devra déclarer rapidement sa créance entre les mains du représentant des créanciers (le délai est de deux mois à compter de la publication au BODACC du jugement d’ouverture du redressement ou de la liquidation, augmenté d’un délai de distance de deux mois pour les créanciers situés à l’étranger). Si le délai a été passé, le créancier peut demander à être relevé de la forclusion, si les conditions prévues par la loi sont réunies. En présence d’un débiteur failli, l’avocat peut recourir à un certain nombre de mesures permettant de sauvegarder les droits du créancier. Ceci est particulièrement le cas, si le créancier bénéficie d’une sûreté (créancier privilégié), ou si une clause de réserve de propriété a été convenue.
mise en demeure adressée par lettre recommandée avec accusé de réception à la société débitrice en vue de faire courir les intérêts légaux de retard et d’accorder un dernier délai au débiteur généralement de 8 jours pour s’exécuter amiablement ; cette lettre de mise en demeure est obligatoire, conformément aux règles régissant les recouvrements de créance ;
faute de réponse à la lettre de mise en demeure, il peut s’avérer utile de prendre des mesures conservatoires sur les biens de la société débitrice. A cette fin, l’avocat devra saisir la juridiction compétente (Juge de l’Exécution) par voie de requête afin de se faire autoriser à procéder à une saisie conservatoire sur les comptes bancaires ou sur les marchandises.
En présence de biens immobiliers, le créancier aurait intérêt à requérir du juge l’autorisation de prendre une hypothèque judiciaire sur lesdits biens. Le Juge n’accordera l’autorisation de saisie qu’à la condition que l’avocat soit en mesure de démontrer qu’il y a urgence à sauvegarder sa créance, puisque le débiteur risque sinon d’organiser son insolvabilité.
fréquemment, la société créancière aura pris la précaution de vendre sa marchandise sous la condition suspensive du paiement intégral de ses factures. Les clauses de réserve de propriétésont parfaitement reconnues par la législation française, à la condition que la clause proposée par le vendeur ait été expressément ou implicitement acceptée par le débiteur. Le Juge auquel on soumettra la demande d’autorisation de saisir une marchandise livrée, veillera plus particulièrement à la manière dont la clause de réserve de propriété a été rédigée (à savoir clairement, correctement mise en valeur et au plus tard, au moment de la livraison des marchandises). Il n’est pas nécessaire que cette clause ait été rédigée en langue française, dans la mesure où il est établi que les partenaires commerciaux communiquaient dans une autre langue.
Si l’ensemble des conditions de validité de la clause de réserve de propriété se trouvent réunies, le juge accordera le droit de saisir la marchandise vendue, entre les mains du débiteur. En cas de revente de la marchandise par le débiteur, il pourra également autoriser la saisie des sommes restant dues par le tiers acquéreur au débiteur français, à condition cependant que la clause de réserve de propriété ait été étendue.
Si le débiteur se trouve déjà en redressement judiciaire, l’avocat aura intérêt à formuler une demande en revendication auprès du Juge commissaire dans un délai préfixe (= non susceptible d’être prolongé) de trois mois (sous peine d’irrecevabilité), à compter de la publication du jugement d’ouverture.
Il peut arriver que sous l’effet de la pression, le débiteur français se rapproche de l’avocat pour trouver un arrangement amiable et qu’il règle sa dette.

II – Phases contentieuses
A défaut, l’avocat devra assigner le débiteur devant la juridiction compétente, qui de façon générale, est le Tribunal de commerce du lieu du siège du débiteur (commerçant). Le Règlement Européen du 22 décembre 2000 ayant succédé à la Convention de Bruxelles permet à l’avocat de déterminer la juridiction compétente (lorsque le litige se situe sur un plan européen), qui doit connaître de la procédure.
Pour le cas où les parties auraient prévu dans leurs conventions une clause compromissoire et qu’elles se sont ainsi mutuellement engagées à soumettre leur litige à une juridiction d’arbitrage, l’avocat devra soumettre l’affaire à l’arbitre désigné dans le contrat.
En cas d’urgence et si le principe de la créance n’est pas contestable (ce qui implique qu’il n’y ait pas de discussions sur la qualité de la marchandise livrée ni sur le montant de la créance à recouvrer), l’avocat peut enclencher une procédure d’urgence appelée « référé ». Cette procédure permet d’obtenir dans un délai rapproché une audience de plaidoirie lors de laquelle le créancier pourra exposer, par l’intermédiaire de son avocat, le fond de l’affaire et démontrer l’existence de sa créance. De façon générale, un référé peut aboutir à une ordonnance dans un délai de un à deux mois. En cas de complication du litige, ce délai peut se trouver rallongé. Il existe également une procédure de référé d’heure à heure, encore plus rapide, mais elle implique que l’avocat obtienne l’autorisation préalable du juge d’assigner pour une date très rapprochée, ce qui représente une situation en pratique exceptionnelle.
lorsque le litige soulève des questions ne permettant pas une saisine du juge des référés, l’avocat chargé du dossier assignera le débiteur «au fond » (procédure au fond). La procédure d’urgence n’étant pas envisageable, le Tribunal de Commerce saisi du dossier, examinera dans sa totalité les arguments des deux parties ; il permettra à la partie adverse (le débiteur) de répliquer, par le biais d’écritures aux arguments avancés, auxquels la société créancière pourra à nouveau répondre et ainsi de suite. Une telle procédure pourra prendre environ un an, tout dépendant des problèmes que soulève le litige. Ainsi, si la qualité de la marchandise livrée devait être contestée par la société débitrice, il est d’usage que le tribunal désigne un expert qui se prononcera exclusivement sur les aspects techniques, non juridiques du dossier. Dans ce cas, la procédure se trouve suspendue jusqu’au dépôt du rapport de l’expert.
A noter que rien n’empêche, même encore à ce stade, de procéder à une saisie conservatoire préalable de fonds ou de marchandises entre les mains du débiteur, ce qui peut parfois amener le débiteur à vouloir donner une tournure plus rapide à la résolution du litige et qui faciliteront de toute façon l’exécution du titre obtenu.
Il est très important de noter que l’avocat soit mis en mesure de produire des éléments de preuve intangibles pour lui permettre de démontrer le bien fondé de sa demande. C’est à ce stade qu’une bonne coopération entre le créancier et son conseil est fondamentale.
Tous les documents rédigés dans une langue autre que le français, doivent être traduits en français ! Les tribunaux français n’acceptent que rarement les témoignages oraux ; en revanche, les attestations écrites rédigées à la main par le témoin suivant un modèle bien défini, sont parfaitement acceptées. D’une façon générale, il faut noter que la procédure devant les juridictions françaises est en pratique écrite, d’où l’importance de produire des preuves écrites convaincantes.
toute décision rendue par une juridiction française doit faire l’objet d’une notification par huissier au débiteur. Cette notification fait courir des délais d’appel, qui, en matière d’ordonnance de référé, sont de quinze jours et, en matière de jugement sur le fond, d’un mois. Les délais d’appel sont augmentés de deux mois lorsque l’acte doit être signifié à une personne ou une société non-résidente en France.
Exécution de la créance : comme nous l’avons vu, toute décision rendue par une juridiction française fera l’objet d’une notification par la voie d’un huissier chargé à cet effet. Cette signification permet non seulement de faire courir des délais d’appel ou de recours, mais elle constitue une formalité obligatoire, afin d’exécuter les décisions et arrêts rendus en dernière instance (à savoir non susceptibles de recours), ainsi que ceux qui sont assortis de l’exécution provisoire. En effet, d’une façon générale, l’avocat demande au juge l’autorisation d’exécuter, à titre provisoire la décision, même si la partie adverse interjette appel.
Quoi qu’il en soit, que l’on soit en présence d’une décision devenue définitive et exécutoire ou d’une autre qui soit assortie de l’exécution provisoire, l’huissier procédera à la saisie des actifs du débiteur, si tant est que ce dernier ne s’exécute pas spontanément. En cas de saisie conservatoire et préalable des biens, le créancier pourra alors, avec l’obtention d’un jugement devenu exécutoire, transformer la saisie conservatoire en saisie exécution. En d’autres termes, il pourra appréhender les biens en guise de règlement de la créance.
Les frais de l’huissier sont à avancer par le demandeur mais seront remboursés sur les biens saisis et réalisés. Bien entendu, souvent, il ne suffit pas de saisir des actifs, mais il faut également les vendre. Cette phase de vente des biens du débiteur s’effectue par l’intermédiaire d’un commissaire priseur dans le cadre d’une vente aux enchères. En présence d’un immeuble, affecté d’une hypothèque au profit du créancier, ce bien sera également vendu aux enchères, devant le Tribunal de Grande Instance.
Procédure d’appel et pourvoi en cassation : comme déjà mentionné ci-dessus, l’adversaire ou le perdant sera, dans la plupart des cas, en mesure de faire appel. En moyenne, les Cours d’Appel (il en existe une vingtaine en France) prennent deux ans pour rendre leur verdict. Un avoué devra, dans la plupart des affaires, être désigné par le demandeur, qui assurera certaines parties procédurales administratives du litige ; mais comme pour les affaires de première instance, c’est l’avocat qui mène l’argumentation juridique et qui plaidera l’affaire.
Il existe également une possibilité de recours contre l’arrêt rendu par la Cour d’Appel : il s’agit du pourvoi en cassation. La Cour de Cassation est localisée à PARIS et n’examine que l’aspect juridique de la demande, à l’exclusion de l’appréciation des faits. La Cour de Cassation est donc juge du droit exclusivement.
Les frais d’une procédure : contrairement à d’autres pays, les procès en France sont quasiment gratuits, en ce sens que le demandeur n’aura pas à débourser des frais de justice proportionnellement aux montants de la demande ; il existe certes quelques taxes à payer, mais elles sont négligeables quant à leur importance.
En revanche, le plaignant devra avancer les frais exposés pour le travail réalisé par les auxiliaires de justice, à savoir : l’avocat, l’avoué (pour l’appel), l’huissier, le traducteur si nécessaire et, éventuellement, tout expert appelé à intervenir pour aider à la compréhension du dossier. Les honoraires d’huissier et d’avoué sont tarifés, alors que ceux de l’avocat sont librement convenus entre l’avocat et son client.
Ils dépendent de l’importance du dossier, de la difficulté de l’affaire et de l’expérience de l’avocat. De façon générale, ils sont évalués sur une base horaire qui peut varier entre 200 et 300 €. En pratique, l’avocat demandera à son client de lui payer un acompte sur frais et honoraires, de façon à pouvoir avancer les frais de l’huissier chargé de la signification de l’assignation au débiteur, ainsi que le traducteur pour les pièces à communiquer.
Globalement, un procès en première instance coûtera environ 15 à 20 % du montant de la créance, tout dépendant bien entendu des problèmes rencontrés lors du procès et du montant de la créance à recouvrer. Parfois, il peut s’avérer intéressant pour le client de convenir d’un montant horaire plus faible, auquel on ajoutera un honoraire de résultat qui sera payé le jour où le demandeur aura obtenu gain de cause. Il s’agit, dans ce cas, d’apprécier les chances de succès du procès, étant entendu que compte tenu de l’aléa, l’honoraire de résultat représentera un pourcentage plus important. Il est cependant interdit en France, au contraire des Etats-Unis, de fixer un honoraire de résultat pur, dit « quota litis » (contengency fee).
Si le demandeur (créancier) gagne son procès, il peut obtenir le remboursement d’une partie des frais exposés, en vertu du principe de l’équité édictée par l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. En pratique, il s’avère cependant que les tribunaux n’accordent qu’un montant réduit et peu important en dédommagement pour les frais exposés. Pour ce qui est des émoluments des avoués, ceux-ci sont systématiquement supportés par le perdant, bien qu’avancés par chacune des parties, ayant mandaté son propre avoué.

Fait à Paris Le 27 octobre 2003
Kay GAETJENS Avocat à la Cour